Avec ses sacs plastique biodégradables, Sphère anticipe la raréfaction des ressources pétrolières et la législation sur la protection de l'environnement.
Le roi de la pomme de terre, c'est Sphère
Le leader européen des emballages ménagers délaisse le pétrole au profit de la pomme de terre pour fabriquer des sacs plastique biodégradables. Un tournant stratégique, accompagné de multiples actions de lobbying et de communication.
Révolution chez SP Metal. Le leader européen des emballages ménagers, rebaptisé Sphère, opère un virage à 180° pour assurer son avenir. Ses produits - sacs-poubelles, sacs de caisse et autres films étirables - utiliseront dorénavant la fécule de pomme de terre, matière végétale renouvelable et 100 % biodégradable, et non plus le polyéthylène, dérivé du pétrole. Première application produit de cette nouvelle stratégie : le lancement, à la fin du mois, du premier sac-poubelle grand public 100 % biodégradable, sous la marque Alpha Pac, référence « premium » et historique du groupe, à l'origine notamment du sac-poubelle à lien coulissant.
Le groupe Sphère se met à la pomme de terre, explique sa directrice de la communication, Marielle Cayron, pour « anticiper la raréfaction des ressources pétrolières et faire face à l'augmentation constante du prix du pétrole ». Sans oublier les enjeux et problèmes environnementaux : la dégradation du sac plastique individuel prend, à l'heure actuelle, entre 100 et 400 ans.
Ce nouveau sac, 100 % biodégradable, est le résultat d'une intense politique de communication et de lobbying. « C'est la guerre du bioplastique », commente Florent Chapel, en charge de la communication du groupe chez Leo Corporate. Car les opposants sont nombreux, notamment du côté de l'industrie pétrolière. « Les critiques, comme les réticences au changement, sont multiples, ajoute Florent Chapel. Les pertes d'emploi dans le secteur de la plasturgie sont redoutées, la qualité du bioplastique, matériau perçu comme moins solide, est mise en doute. Même les écologistes craignent que cela incite à jeter les sacs dans la nature. »
Le groupe Sphère et l'agence Leo Corporate ont donc entrepris de prêcher la bonne parole. Notamment auprès des politiques, en pleine rédaction des décrets d'application de la loi d'octobre 2005 interdisant, en 2010, la distribution et la commercialisation de sacs plastique individuels non biodégradables. « Faire une loi sur un sac qui est voué à disparaître, c'est un coup d'épée dans l'eau, estime Florent Chapel. Nous souhaiterions que la loi concerne l'ensemble des emballages, pas seulement les sacs de caisse, mais aussi des produits biodégradables à 100 %. » Quoi qu'il en soit, pour Sphère, la législation va dans le bons sens. En octobre 2005, une annonce presse du groupe le rappelait : « Nous serons prêts en 2010, car nous sommes prêts en 2005. »
Les consommateurs sont eux aussi l'objet de toute son attention. Car les sacs biodégradables coûtent jusqu'à deux fois plus cher. Et même si 87 % des Français se disent prêts à payer plus pour ce type de produit, les bonnes intentions s'évanouissent bien souvent lors du passage en caisse. Pour toucher les consommateurs en faisant oeuvre de pédagogie, le groupe compte sur les relations presse, mais aussi sur Internet. Il lancera, fin avril, le site bioplastiques.com. Sont également prévues des actions ciblées de RP pour installer le nouveau nom, le logo verdoyant et la signature de Sphère, « Le plastique change d'ère ». Difficile en effet de traduire le tournant environnemental du groupe avec un nom comme SP Metal.
Delphine Masson
Un géant aux mains vertes
Leader européen des emballages ménagers, Sphère détient en France 60 % du marché. L'aluminium (papier, barquettes, etc.) occupe 10 % de son activité, le reste étant consacré aux sacs plastique, vendus aux entreprises, aux collectivités locales, au grand public (sous la marque Alpha Pac) et aux distributeurs pour leur marque propre. Au total, Sphère revendique 292 millions d'euros de chiffre d'affaires, 1 300salariés et 13 sites de production. Pour s'orienter vers les bioplastiques, le groupe a acquis, en septembre 2005, 50 % de la société Biotec, spécialisée dans les matières premières végétales renouvelables. Ces dernières devraient concerner l'ensemble de sa production d'ici cinq à dix ans.